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Un arrêt de la Cour d’appel de Rennes illustre le risque pour une société d’une marque déposée par un de ses dirigeants.
 

Dans cette affaire, l’historique est le suivant:
 

  • une société Y est créée en 2006.
  • M. X dépose la marque LED POWER en 2007 en classe 11 notamment pour des lampes.
  • M. X entre au capital social de la société Y en 2008 et la société Y prend la dénomination sociale LEDPOWER en 2010.

 

Aucun accord de licence n’a été signé mais M. Y a autorisé tacitement la société à utiliser la marque comme dénomination sociale et comme nom de domaine.
 

Un pacte d’actionnaires a cependant été signé selon lequel : « Les dirigeants s’engagent à faire en sorte que la société possède à tout moment un droit valable, soit à travers la propriété ou la copropriété, soit à travers une licence, à l’utilisation de tous les droits de propriété littéraire et artistique ou industrielle en ce compris notamment, les logiciels, dessins ou modèles, brevets, savoir-faire, marques, noms de domaine ou noms commerciaux qu’elle utilise dans le cadre de son exploitation courante ou qui seraient nécessaires au développement de ses activités ».
 

En 2012, M. X est relevé de ses fonctions de président de la société et il est licencié.
 

La société LED POWER ayant continué à utiliser ce signe, M. X agit en contrefaçon.
 

L’arrêt est intéressant sur trois questions juridiques.
 

Premièrement, la Cour d’appel juge que le pacte d’actionnaire ne vaut pas transfert de la marque. En effet, la société savait qu’elle ne bénéficiait que d’une licence tacite sur la marque, et ne pouvait se prévaloir d’aucun droit de propriété. Selon la Cour, « Il ne revient pas à la cour d’ordonner un transfert de la marque, un manquement de M. X à son engagement de transfert, qui n’était qu’un engagement de faire, ne pouvant conduire à ce transfert lui-même. ».  Cette analyse parait fondée puisque le pacte prévoyait l’hypothèse de la licence et ne peut constituer une cession valable à défaut d’obligations précises en ce sens.

 

Deuxièmement, la société Y soulevait la nullité de la marque LED POWER pour défaut de caractère distinctif. La demande est rejetée par la Cour d’appel qui considère que l’association des termes LED et POWER n’est pas, dans le langage courant ou professionnel, exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelles des produits en cause et que cette combinaison de termes ne sert pas non plus à désigner une caractéristique de ces produits. Le rejet de la marque par l’OHMI est écarté par la Cour puisque les règles applicables ne sont pas les mêmes. Le consommateur de langue anglaise aura certainement une perception différente de celle du consommateur français.

 

Troisièmement, la Cour considère que la poursuite de l’utilisation de la marque au-delà d’un préavis d’une année constitue une contrefaçon. Ce préavis a été fixé judiciairement puisque M. X a manifesté sa volonté de mettre fin à la licence en assignant. La société Y ayant mis près de 3 ans à cesser l’utilisation de la marque, elle est condamnée à verser 80.000 €.

 

Du point de vue d’une société, il faut donc être vigilant dans l’hypothèse où la marque exploitée appartient à un dirigeant. Il faut au minimum prévoir une licence avec un préavis assez long pour changer les signes distinctifs utilisés par la société.

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